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APOL1 et risque génétique de maladie rénale chez les personnes d'ascendance africaine

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APOL1 et risque génétique de maladie rénale chez les personnes d'ascendance africaine
  • déc., 23 2025
  • Publié par Deana Johnson

Si vous êtes d’ascendance africaine et que vous avez été diagnostiqué avec une maladie rénale sans cause évidente comme le diabète ou l’hypertension, il y a une chance que la réponse soit dans votre ADN. Ce n’est pas une question de race, mais d’histoire génétique. Depuis des milliers d’années, une mutation dans le gène APOL1 a protégé les populations d’Afrique de l’Ouest contre une maladie mortelle : la trypanosomiase, ou maladie du sommeil. Aujourd’hui, cette même mutation augmente le risque de défaillance rénale chez les descendants de ces populations. C’est un paradoxe biologique : un gène qui sauve des vies dans un contexte ancien devient un fardeau dans notre monde moderne.

Comment APOL1 a-t-il évolué ?

Il y a entre 3 000 et 10 000 ans, dans les régions de l’Afrique de l’Ouest - notamment au Ghana, au Nigeria et au Sénégal - une mutation s’est produite dans le gène APOL1. Cette mutation, appelée variant G1 ou G2, permettait à la protéine APOL1 de détruire le parasite Trypanosoma brucei rhodesiense, responsable de la maladie du sommeil. Les personnes portant une copie de cette mutation avaient un avantage de survie : elles étaient moins susceptibles de mourir de cette maladie vectorisée par la mouche tse-tse. Ceux qui en avaient deux copies - deux variants - étaient encore plus protégés. Avec le temps, cette mutation est devenue fréquente dans ces populations. Aujourd’hui, environ 30 % des habitants d’Afrique de l’Ouest portent au moins un variant APOL1 à haut risque.

Lorsque l’esclavage transatlantique a dispersé des millions de personnes d’Afrique vers les Amériques, ces variants ont suivi. Aujourd’hui, 13 % des Afro-Américains portent deux copies de ces variants (G1/G1, G2/G2 ou G1/G2), ce qui les place dans la catégorie à haut risque. Ce n’est pas une question de couleur de peau. C’est une question de lignée génétique. Et c’est la raison pour laquelle les populations d’ascendance africaine ont un risque 3 à 4 fois plus élevé de développer une insuffisance rénale terminale que les populations d’origine européenne.

Quelles maladies rénales sont liées à APOL1 ?

Les variants APOL1 ne causent pas une maladie rénale unique. Ils augmentent la vulnérabilité à plusieurs formes graves de lésions glomérulaires :

  • Focal segmental glomerulosclerosis (FSGS) : une maladie où les filtres du rein (glomérules) se cicatrisent et perdent leur fonction. Chez les Afro-Américains, jusqu’à 50 % des cas non diabétiques de FSGS sont liés à APOL1.
  • Glomérulopathie effondrée : souvent observée chez les personnes vivant avec le VIH, mais bien plus fréquente et plus sévère chez celles portant les variants APOL1. Jusqu’à 49 % des cas d’insuffisance rénale terminale chez les Afro-Américains vivant avec le VIH sont attribuables à APOL1.
  • Néphropathie hypertensive : souvent diagnostiquée comme « hypertension simple », mais chez les porteurs de variants APOL1, cette forme peut évoluer rapidement vers une insuffisance rénale, même avec une pression artérielle modérément élevée.

Le point crucial ? La plupart des personnes portant deux variants APOL1 n’auront jamais de maladie rénale. Seulement 15 à 20 % développent une lésion rénale au cours de leur vie. Cela signifie que le gène ne suffit pas à lui seul. Il faut un « deuxième coup » : une infection (comme le VIH), un stress métabolique, une exposition à certains médicaments, ou même des facteurs environnementaux comme le tabagisme ou l’obésité.

Test génétique : utile ou inutile ?

Les tests génétiques pour APOL1 sont disponibles depuis 2016. Ils coûtent entre 250 et 450 dollars, selon le laboratoire. Ils ne sont pas recommandés pour tout le monde. Mais ils sont cruciaux dans certains cas :

  • Personnes d’ascendance africaine avec une maladie rénale non diabétique.
  • Personnes d’ascendance africaine avec un antécédent familial de maladie rénale précoce.
  • Candidats potentiels à la transplantation rénale - surtout s’ils envisagent de devenir donneurs vivants.

En 2023, les directives de la Société américaine de néphrologie recommandent que les donneurs vivants d’ascendance africaine soient testés pour APOL1 avant la donation. Pourquoi ? Parce qu’un donneur porteur de deux variants a un risque accru de développer une insuffisance rénale à long terme après la donation. Et ce risque n’est pas négligeable.

Le problème ? Beaucoup de médecins ne savent pas comment interpréter les résultats. Une enquête de 2022 a montré que 78 % des néphrologues se sentaient mal formés pour expliquer les résultats à leurs patients. Beaucoup pensent encore que « APOL1 haut risque » signifie « vous allez avoir une insuffisance rénale ». Ce n’est pas vrai. Cela signifie : « Vous avez un risque accru. Vous devez être surveillé. »

Personne surveillant son urines et sa pression artérielle, avec des facteurs de risque en arrière-plan.

Que faire si vous êtes à haut risque ?

Si vous savez que vous portez deux variants APOL1, vous n’avez pas besoin de paniquer. Vous avez besoin d’un plan.

  • Surveillance annuelle : test d’albumine dans les urines (UACR) et mesure de la pression artérielle. L’albumine dans les urines est le premier signe de lésion rénale.
  • Contrôle de la pression artérielle : cible < 130/80 mmHg. Les inhibiteurs de l’ECA ou les bloquants des récepteurs de l’angiotensine (ARB) sont souvent recommandés, même si la pression est normale.
  • Évitez les toxines : certains analgésiques (comme l’ibuprofène) et certains antibiotiques peuvent aggraver la lésion rénale chez les porteurs APOL1.
  • Contrôlez le poids et le diabète : même si vous n’avez pas de diabète, un excès de poids augmente la charge sur les reins.
  • Ne fumez pas : le tabac accélère la détérioration rénale.

Des cas comme celui d’Emani, cité par la Kidney Fund en 2023, montrent que la détection précoce peut changer la donne. Diagnostiquée avant toute lésion rénale, elle a commencé à surveiller son urines et sa pression artérielle. Cinq ans plus tard, ses reins fonctionnent toujours normalement.

Les traitements à venir

Le plus grand espoir pour les personnes à haut risque APOL1 ne vient pas de la prévention, mais de la médecine ciblée. En octobre 2023, les résultats d’un essai clinique de phase 2 publiés dans le New England Journal of Medicine ont montré que VX-147, un inhibiteur de la protéine APOL1 développé par Vertex Pharmaceuticals, a réduit la protéinurie (excrétion anormale de protéines dans les urines) de 37 % en seulement 13 semaines.

C’est la première fois qu’un traitement vise directement la cause génétique de la maladie rénale chez les personnes d’ascendance africaine. D’autres molécules sont en cours de développement. En 2023, le NIH a alloué 125 millions de dollars à la recherche sur APOL1 - un bond de 47 % depuis 2020. Le marché des tests génétiques APOL1 devrait atteindre 43 millions de dollars d’ici 2027.

Le vrai défi ? L’équité. Seuls 12 % des pays à revenu faible ou intermédiaire ont accès à ces tests. Et même dans les pays riches, les populations défavorisées ont souvent moins accès aux soins spécialisés. Sans intervention, les nouveaux traitements pourraient profiter uniquement aux plus riches - ce qui creuserait encore davantage les inégalités.

Seringue VX-147 traitant un rein, avec des mains du monde entier tenant une balance de justice.

Ne confondez pas race et ascendance

Beaucoup de gens pensent que « APOL1 est une maladie noire ». C’est une erreur dangereuse. Ce n’est pas une maladie raciale. C’est une maladie génétique liée à une ascendance spécifique. Des personnes d’ascendance africaine vivant en France, en Suisse, au Royaume-Uni ou au Brésil sont concernées. Des personnes blanches avec des ancêtres africains peuvent aussi être porteuses. Et des personnes noires sans ascendance ouest-africaine - par exemple, d’Afrique de l’Est ou d’Afrique du Sud - ne portent généralement pas ces variants.

Le Dr Olugbenga Gbadegesin, de l’Université Vanderbilt, l’a dit clairement : « Il faut arrêter de confondre la race - un concept social - avec l’ascendance - un fait biologique. »

La recherche sur APOL1 a poussé la médecine à abandonner les formules de calcul de la fonction rénale basées sur la race. Depuis 2022, l’American Medical Association et d’autres organismes recommandent de ne plus utiliser la « correction raciale » dans les estimations de la clairance de la créatinine. C’est un pas majeur vers une médecine plus précise et plus juste.

Que faire maintenant ?

Si vous êtes d’ascendance africaine et que vous avez des antécédents familiaux de maladie rénale, parlez-en à votre médecin. Demandez un test d’albumine urinaire. Si votre fonction rénale est normale mais que vous avez des antécédents familiaux, envisagez un test génétique.

Si vous êtes déjà diagnostiqué avec une maladie rénale sans cause claire, demandez à votre néphrologue si un test APOL1 est approprié. Ce n’est pas une question de fatalisme. C’est une question de contrôle. Savoir vous donne le pouvoir de prévenir, de surveiller, et de demander les bons traitements.

Le gène APOL1 n’est pas votre destin. C’est une carte. Et comme toute carte, elle ne vous dit pas où vous allez - seulement les routes possibles. Ce que vous faites ensuite, ça, c’est à vous de le choisir.

Qu’est-ce que le gène APOL1 et pourquoi est-il important pour les maladies rénales ?

Le gène APOL1 produit une protéine qui protège contre la maladie du sommeil en détruisant un parasite. Deux variantes spécifiques (G1 et G2), apparues il y a des milliers d’années en Afrique de l’Ouest, offrent une meilleure protection, mais endommagent les cellules rénales. Les personnes qui héritent de deux copies de ces variantes ont un risque accru de développer des formes graves de maladie rénale, comme le FSGS ou la glomérulopathie effondrée. C’est la principale raison génétique expliquant pourquoi les personnes d’ascendance africaine ont un risque plus élevé d’insuffisance rénale.

Tout le monde d’ascendance africaine doit-il se faire tester pour APOL1 ?

Non. Le test n’est pas recommandé pour tout le monde. Il est principalement utile pour les personnes d’ascendance africaine qui ont déjà une maladie rénale sans cause évidente, ou celles qui envisagent de devenir donneurs de rein vivants. Pour les personnes en bonne santé sans antécédents familiaux, le test n’est pas nécessaire - car la majorité des porteurs ne développent jamais de maladie rénale. Le test peut causer de l’anxiété si mal interprété.

Si j’ai deux variants APOL1, vais-je forcément avoir une insuffisance rénale ?

Non. Seulement 15 à 20 % des personnes avec deux variants développent une maladie rénale au cours de leur vie. Le reste reste en bonne santé. Cela signifie que le gène seul ne suffit pas. Il faut un « deuxième coup » : infection (comme le VIH), hypertension mal contrôlée, obésité, ou exposition à certains médicaments. Le contrôle de ces facteurs peut empêcher la maladie de se déclencher.

Les traitements contre APOL1 existent-ils déjà ?

Oui, mais ils sont encore en phase d’essai clinique. Le médicament VX-147, développé par Vertex Pharmaceuticals, a montré une réduction de 37 % de la protéinurie en 13 semaines dans un essai de phase 2 en 2023. Ce n’est pas encore disponible au public, mais il représente la première thérapie ciblant directement la protéine APOL1. D’autres médicaments sont en cours de développement. En attendant, le contrôle de la pression artérielle et la surveillance régulière sont les meilleures armes.

Pourquoi les tests APOL1 ne sont-ils pas disponibles dans tous les pays ?

Parce que les tests génétiques sont coûteux et nécessitent une infrastructure médicale spécialisée. Seuls 12 % des pays à revenu faible ou intermédiaire ont accès à ces tests. La plupart des ressources sont concentrées aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Europe. Cela crée une inégalité mondiale : les populations les plus à risque - en Afrique de l’Ouest, par exemple - sont souvent les moins bien équipées pour les détecter ou les traiter. C’est un problème d’équité en santé, pas seulement de technologie.

Étiquettes: APOL1 maladie rénale ascendance africaine génétique rénale FSGS
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