Si vous êtes enceinte ou vous essayez de le devenir, et que vous prenez de la sertraline, vous vous posez probablement des questions qui vous gardent éveillée la nuit. Est-ce que ce médicament est sûr pour mon bébé ? Dois-je arrêter ? Et si je ne l’arrête pas, qu’est-ce qui peut arriver ? Ces peurs sont normales. Et vous n’êtes pas seule. Des milliers de femmes traversent la même décision chaque année.
Qu’est-ce que la sertraline ?
La sertraline est un antidépresseur de la classe des ISRS (Inhibiteurs Sélectifs du Recaptage de la Sérotonine). Elle est prescrite pour traiter la dépression, les troubles anxieux, le TOC et le stress post-traumatique. Des marques comme Zoloft contiennent de la sertraline. Elle agit en augmentant la quantité de sérotonine dans le cerveau - un neurotransmetteur qui régule l’humeur, le sommeil et l’appétit.
Beaucoup de femmes prennent la sertraline pendant des années avant de tomber enceinte. Pour certaines, arrêter le médicament est plus dangereux que de le continuer. La dépression non traitée pendant la grossesse augmente le risque de prématurité, de poids de naissance faible, et même de complications post-partum comme la dépression post-natale.
Est-ce que la sertraline traverse le placenta ?
Oui. La sertraline passe dans le sang du fœtus. Mais ce n’est pas une surprise : presque tous les médicaments que vous prenez atteignent le bébé. La question n’est pas « est-ce qu’elle passe ? », mais « à quel point cela affecte-t-il le bébé ? »
Des études menées sur plus de 10 000 grossesses montrent que la sertraline est l’un des ISRS les plus étudiés et les mieux tolérés pendant la grossesse. Contrairement à d’autres antidépresseurs comme la paroxétine, la sertraline n’a pas été liée à un risque accru de malformations cardiaques majeures. Les données les plus récentes, publiées en 2024 par l’American College of Obstetricians and Gynecologists, confirment que la sertraline reste le choix privilégié pour les femmes enceintes ayant besoin d’un traitement antidépresseur.
Les risques réels - et ce qui est exagéré
Il existe des risques, mais ils sont souvent mal compris. Voici ce que la science dit vraiment :
- Retrait néonatal : Environ 15 à 30 % des bébés nés de mères prenant de la sertraline développent des symptômes temporaires comme l’irritabilité, les pleurs excessifs ou des troubles du sommeil. Ces signes disparaissent généralement en quelques jours à deux semaines. Ce n’est pas une dépendance - c’est une réaction physiologique normale à l’arrêt soudain du médicament.
- Prématurité : Un léger risque accru de naissance avant 37 semaines a été observé, mais il est souvent lié à la sévérité de la dépression elle-même, pas au médicament.
- Malformations : Aucune étude de grande taille n’a trouvé de lien clair entre la sertraline et des anomalies congénitales majeures. Le risque global reste inférieur à 2 %, ce qui correspond au risque de la population générale.
- Autisme ou troubles du développement : Les premières études suggéraient un lien, mais les recherches plus récentes, corrigeant les biais, montrent qu’il n’y a pas de causalité. La dépression maternelle non traitée semble être le vrai facteur de risque.
En résumé : les risques de la sertraline sont faibles. Les risques de ne pas traiter la dépression sont bien plus élevés.
Et si je veux arrêter ?
Ne stoppez pas la sertraline brutalement. Un arrêt soudain peut provoquer des symptômes de sevrage : vertiges, nausées, anxiété, troubles du sommeil, voire une rechute dépressive. Et une dépression sévère pendant la grossesse peut nuire à la santé du bébé autant, voire plus, qu’un traitement médicamenteux.
Si vous souhaitez arrêter, parlez-en à votre médecin. Une réduction progressive sur plusieurs semaines - parfois même sur plusieurs mois - est la méthode la plus sûre. Certains médecins proposent de remplacer la sertraline par une thérapie cognitivo-comportementale (TCC) pendant la grossesse, surtout si les symptômes sont légers à modérés.
Les alternatives à la sertraline
Il n’y a pas de « meilleur » antidépresseur pour la grossesse - seulement le plus adapté à chaque cas. Voici ce que les spécialistes considèrent :
| Médicament | Risque de malformations | Risque de retrait néonatal | Recommandé pendant la grossesse ? |
|---|---|---|---|
| Sertraline | Très faible | Modéré | Oui, premier choix |
| Citalopram | Faible | Modéré | Oui |
| Escitalopram | Faible | Modéré | Oui, mais données moins nombreuses |
| Paroxétine | Élevé (risque cardiaque) | Modéré | Non, à éviter |
| Fluoxétine | Faible | Élevé (dure plus longtemps) | Peut être utilisé, mais moins préféré |
La thérapie non médicamenteuse est aussi une option sérieuse. La TCC a prouvé son efficacité pour la dépression légère à modérée pendant la grossesse. Des études montrent que 60 à 70 % des femmes voient une amélioration significative après 12 séances.
Quand consulter un spécialiste ?
Vous devriez consulter un psychiatre spécialisé en santé mentale périnatale si :
- Vos symptômes sont sévères (pensées suicidaires, incapacité à vous alimenter ou vous lever)
- Vous avez déjà eu une dépression post-partum
- Vous avez essayé de réduire ou d’arrêter la sertraline et vous avez eu une rechute
- Vous prenez d’autres médicaments ou vous avez des antécédents médicaux complexes
Les centres de santé mentale périnatale, présents dans les grands hôpitaux en Suisse, offrent des suivis personnalisés. Ils travaillent en équipe avec les gynécologues pour ajuster les traitements au fil de la grossesse.
Le moment idéal pour ajuster le traitement
La première chose à savoir : la grossesse n’est pas une période où tout doit être « parfait ». C’est une période où la priorité est de maintenir votre stabilité mentale.
Si vous êtes déjà enceinte et que vous prenez de la sertraline, ne paniquez pas. La plupart des femmes qui continuent ce traitement ont des bébés en parfaite santé. L’important, c’est de ne pas changer de traitement sans avis médical.
Si vous envisagez une grossesse dans les mois à venir, planifiez la discussion avec votre médecin au moins 3 à 6 mois à l’avance. Cela permet de stabiliser votre état, d’explorer les alternatives, et d’éviter les changements brusques.
Et après l’accouchement ?
La sertraline est aussi l’un des antidépresseurs les plus sûrs pendant l’allaitement. Moins de 1 % de la dose maternelle passe dans le lait, et les bébés allaités n’ont pas montré d’effets néfastes dans les études cliniques. Si vous souhaitez allaiter, la sertraline est souvent la première option recommandée.
Les symptômes de retrait néonatal peuvent apparaître dans les premiers jours après la naissance. Cela ne veut pas dire que votre bébé est malade. C’est juste un ajustement. Votre pédiatre saura reconnaître ces signes et vous guidera.
Vous n’êtes pas seule - et vous méritez d’aller bien
Prendre un antidépresseur pendant la grossesse n’est pas un échec. C’est une décision de soin. Une femme qui traite sa dépression pendant la grossesse a plus de chances d’être présente, réactive et en paix avec elle-même après la naissance de son enfant.
Les études montrent que les bébés de mères traitées pour la dépression ont des scores de développement cognitif et émotionnel aussi bons - voire meilleurs - que ceux de mères non traitées, car elles sont plus stables, plus attentives, et moins stressées.
Il n’y a pas de bonne réponse universelle. Mais il y a une bonne façon de trouver la vôtre : avec des données, du soutien, et un médecin qui vous écoute.
La sertraline peut-elle causer une fausse couche ?
Aucune étude de grande envergure n’a établi de lien entre la sertraline et un risque accru de fausse couche. Les données disponibles montrent que le taux de fausses couches chez les femmes prenant de la sertraline est similaire à celui de la population générale. Le risque principal de fausse couche reste lié à l’âge, aux antécédents médicaux ou à la sévérité de la dépression non traitée.
Puis-je prendre de la sertraline au premier trimestre ?
Oui. Le premier trimestre est la période la plus critique pour le développement du fœtus, mais la sertraline est l’un des ISRS les mieux étudiés à ce stade. Des analyses de plus de 8 000 grossesses n’ont pas montré d’augmentation des malformations majeures. Les médecins recommandent souvent de continuer la sertraline si elle est efficace, car le risque de rechute dépressive est plus élevé que le risque lié au médicament.
La sertraline affecte-t-elle la fertilité ?
Il n’existe aucune preuve que la sertraline diminue la fertilité chez les femmes. Certaines études suggèrent même que le traitement de la dépression peut améliorer les chances de conception, car l’humeur stable favorise un cycle menstruel régulier et une meilleure qualité de vie. Si vous avez des difficultés à tomber enceinte, parlez-en à votre médecin - la cause est rarement liée au médicament.
Quels signes doivent m’inquiéter chez mon bébé après la naissance ?
Les signes de retrait néonatal sont généralement légers et passagers : pleurs excessifs, tremblements, difficultés à s’alimenter, sommeil agité. Ils apparaissent dans les 24 à 72 heures après la naissance et disparaissent en quelques jours. Si votre bébé a de la fièvre, des convulsions, ou des difficultés respiratoires, consultez immédiatement un médecin - ce ne sont pas des symptômes de retrait, mais des signes d’un problème médical différent.
Dois-je faire des examens spéciaux pendant ma grossesse si je prends de la sertraline ?
Non. La sertraline ne nécessite pas d’examens supplémentaires par rapport à une grossesse normale. Les échographies de repérage et les analyses de sang habituelles suffisent. En revanche, si vous avez d’autres facteurs de risque (diabète, hypertension, antécédents de malformations), votre médecin peut recommander des examens plus précis - mais cela ne dépend pas de la sertraline.